Comme un grand Tour. La triple couronne Haute Route s’est résumé par :

  • 18 jours de courses dont 2 contre la montre
  • Des étapes de hautes montagnes qui varient de 100 à 180 km, plus de 3000 m de dénivelé par jour
  • Trois massifs : Les Dolomites, Les Alpes et les Pyrénées
  • Au final 2238 km, 50 553m D+, 82h de vélo

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Comme un PRO ?

Oui dans le nombre de jours, mais pas dans la logistique et sur le format des étapes. La Haute Route nous offre les massages et le transport des bagages, mais après la course vous avez encore beaucoup à penser pour optimiser votre récupération et enchaîner les étapes. Bien manger, dormir, s’hydrater, se changer les idées, du stretching, …

Cette année, j’ai fait le choix de retirer mon capteur de puissance et de me fier à mes sensations. Je n’aurai donc aucune donnée objective pour constater la progression.  Une simple montre au poignet, mon cardio fréquencemètre et à mon écoute pour me gérer. Les résultats à chaque étape prouveront ma progression. (lire mon évolution de la puissance en 2013)

Je trouve que la puissance nous bride, et je sais qu’il  aurait été inutile de connaître ses valeurs.

Pour être devant, il faut être là, devant et présent.

Inutile de savoir à quel watt tu roules, si cela roule trop vite, il faut être humble et savoir se ménager. Si tu as confiance en toi et que tu sais que tu peux tenir, alors accroche-toi ! L’axe psychique a été un déterminant majeur de ma progression sur les Haute Route.

Il y a aussi d’autres points qui auront influé sur les performances

  • Les conditions météo : j’ai observé que dans le froid, j’avais du mal à me mettre à fond. Mais cela joua aussi un rôle sur la motivation. On n’a pas forcément envie de rouler sous la pluie !
  • La qualité sportive du peloton : Cela sait surtout vue dans les Alpes. Le fait que le niveau soit meilleur, m’a permis de relever mon propre niveau et de m’accrocher.
  • L’effet de groupe : ne pas s’isoler, bavarder entre collègues, se changer les idées et parler autre chose que du vélo. Cela permet à l’esprit de se détendre, et d’éviter d’avoir des cogitations inutiles
  • La position sur le vélo. Au cours des Haute Route, j’ai dû adapter ma position sur le vélo, et surtout changer de style, en pédalant, le plus souvent en danseuse et étant assis en vélocité. Préserver mes forces et soulager la chaine musculaire.

Les Dolomites

Les 3 premiers jours ont été les plus difficiles. J’ai eu du mal à entrer dans le sujet. Je ne tenais pas le rythme, j’avais les jambes dures, dans toutes les ascensions.

Lors du contre-la-montre du Stelvio, j’ai revérifié ma hauteur de selle, et cette dernière n’était pas à la bonne hauteur. Rehausser de quelques millimètres, j’ai réalisé un superbe chrono et retrouvé un bon coup de pédale.

À J5, je me sentais de mieux en mieux et progressais également au classement général, alors que d’autres régressaient, et n’avaient plus la même fraîcheur que lors du départ.

Pulsations maxi lors du J1 à 188. Dès le J2, j’ai perdu 10 puls et la dérive c’est vérifiée de jour en jour, pour se stabiliser entre 165 à 170 puls et ce jusque dans les Pyrénées.

Pour autant, j’ai réussi à relever mon niveau et maintenir une bonne résistance au seuil et en endurance, en adaptant ma position sur le vélo.

Je termine 15e au général de la Haute Route Dolomites.

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Les Alpes.

Le niveau sportif était plus haut. Je savais que le rythme allait être difficile à suivre. Je ne fus pas surpris, et mes homologues de la triple couronne  étaient dans le même état. Mais au final de la dernière, je me classais 18e. Un résultat honorable. J’étais dans une bonne spirale, même si cela est difficile de ne pas se sentir à sa place.

L’étape 2 entre Megève et Courchevel, allait être un jour très noir. (relire l’article) Là, le cœur a dit stop. Le froid, la fatigue m’ont joué des tours. Grève du cœur, rien ne voulait avancer. Calé à 135 pulsations dans les montées, complètement à la dérive, mon énergie est venue du soutien amical de Jean-Christophe Bette pendant l’ascension du Cormet de Roselend. Le regain d’énergie revient dans la dernière ascension. Dégringolade au classement général, il faut se remobiliser pour l’étape du lendemain. Ce jour, j’aurai vidé mes batteries, pour mieux les remplir.

Phénomène de Surcompensation.

J11 a été incroyable. 6h de vélo sous des trombes d’eau mais qui fut pour moi, la meilleure des journées !

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La surcompensation qui par définition est une réaction constructive dynamique qui permet d’augmenter les réserves fonctionnelles. Je crois que ce jour a été le point de départ, mon évolution physiologique à enchaîner graduellement la Haute Route.

J’ai pu constater d’étape en étape mes progrès, et de manière rationnelle, je vivais chaque jour à fond, et avec des sensations meilleures.

Je me sentais avec une meilleure force, une meilleure coordination neuro musculaire dans le mouvement générale que ce soit ma facilité à tenir longtemps la position de danseuse sans essoufflement ou à maintenir de la vélocité assise.

Ce qui me le confirme, c’est le jour du contre-la-montre, où je réalise mon meilleur temps sur la montée de l’Alpes d’Huez du Tour de France en 51’59’’ améliorants de 2’30 mon précédent temps de 2012.

Je termine 10e au général de Haute Route Alpes.

Haute Route Pyrénées

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J’aurai pensé que ce serait  la plus difficile au bout de 2 semaines, avec la présence de la fatigue. Mais je me rappelle au tour de France, où souvent on entend les champions dire que c’est dans la 3e semaine que l’on peut tout perde et qu’il faut être le meilleur.

La fatigue, elle existe bien. Mais lors de la première étape, j’ai pu constater que j’étais facile. C’était la première fois que j’avais autant d’aisance et de lucidité à observer les participants.

Ce jour- là, je me suis dit, je peux jouer la « «gagne » .

Presque! à 6 secondes. Hasard ou non, c’est Paul Hamblett, qui réalise aussi la triple couronne et termine 1er de l’étape.

Le lendemain sera différent. Moins facile, je subirais un peu plus. Mais je resterais constant les étapes suivantes. C’est un constat. À chaque étape 2 de Haute Route, je suis moins bien, pour ensuite progresser les étapes suivantes.

La suite sera moins drôle. Une chute et une clavicule cassée mettra un terme à cette belle aventure. Je garde le regret de ne pas avoir pu me battre pour le podium de la Haute Route Pyrénées. Mais le chemin parcouru a été exceptionnel.

Conclusions.

  • Il faut de l’entraînement pour s’attaquer aux  3 Haute Route.
  • Si tu es fatigué ? dors.  Si tu as faim ? Manges … Si tu n’arrives pas à suivre ? ralentis
  • Il faut garder confiance et ne pas penser au lendemain.
  • Il ne faut pas s’isoler, mais au contraire partager chaque moment.

J’en conclue que si tu es bien classé au général et que tu veux défendre une place ou tout simplement être FINISHER, nous sommes capables de réaliser de grandes choses.

Je suis épaté de voir comment le corps et l’esprit peuvent réagir en synchronicité. Je ne l’explique pas. Il y a probablement des éléments scientifiques tangibles. Mon explication est que la motivation, et la préparation mentale à ces 3 haute Route est importante. Il faut voir l’évènement dans sa totalité, et accepter les étapes au jour le jour.

L’esprit a été capable de rompre avec les signaux de fatigue et la physiologie s’est adaptée.

Même si je me dis que ma chute est un signe d’inattention dû à la fatigue. Jusqu’où vont les limites. Je pense avoir exploré et vécu une course incroyable qui m’a fait grandir sur de nombreux points.

Il faut savoir rester humble et modeste face à soi.

Cette expérience m’ouvre d’autres projets, que je ne tarderai pas à vous dévoiler.

L’espace entre la psyché et la performance physique est intimement lié.