Molveno. Le mot claque comme nos dents à la sortie de l’eau, mais résonne aussi doux comme une soirée au bord du lac. C’était la dernière, notre ultime pèlerinage sur cette terre italienne, au pied de ces Dolomites di Brenta qui ont vu naître des champions et grandir tant de nos rêves. Les lieux ont une âme ; celle de Molveno est faite de sommets majestueux, d’eaux froides et de boue généreuse. Aujourd’hui, le reportage est une carte postale de témoignage, écrite à la première personne, car l’émotion ne se partage qu’au singulier.
« Les plus beaux voyages ne sont pas ceux où l’on part, mais ceux où l’on revient. »
Le Paysage
Je suis venu, j’ai vu, et j’ai encore été conquis par le spectacle de la nature. Amandine, la Belge, le formule avec une justesse poétique : elle parle des « Fifty Shades of Molveno », cette montagne qui change de couleur mille fois par jour. Ce n’est pas un décor, c’est un membre de la famille qui nous accueille. Elle me confie que même en revenant souvent, l’effet « waouh » est systématique, une impression de lieu magique. C’est le premier lien qui nous unit, ce décor immuable et changeant.
Mais la magie, c’est aussi le froid qui pique. Bruno du Luxembourg, pour sa troisième édition, a un souvenir indélébile : la température de l’eau. Il le dit sans détour, on la retient « systématiquement ». Le confort n’est pas le but, le défi l’est. Le corps oublie la douleur ; l’âme se souvient de l’effort accompli dans ce cadre divin.
« On ne se souvient pas des jours, on se souvient des moments. Et les moments d’exception demandent souvent une eau qui glace le sang. »
Derrière la ligne, l’esprit de la Famille XTERRA
Si la nature nous rassemble, l’humain nous soude. Ce Championnat du Monde, c’est notre fête de famille. Les témoignages affluent sur cette notion de communauté, un cercle fraternel qui dépasse les drapeaux et les catégories.
L’élite Jens Roth, l’Allemand, capture parfaitement cette idée. Son meilleur souvenir, c’est d’avoir pu amener chacun de ses cinq amis pour partager l’atmosphère de la course. « Partager des souvenirs et des moments avec les amis qui me soutiennent depuis de très nombreuses années. » Le podium n’est rien sans l’épaule qui vous y a mené. C’est le sens de la famille que l’on choisit, celle que l’on forge sur les sentiers boueux et les tables de ravitaillement.
Fabio Gallassi, athlète italien, bien qu’il n’ait jamais « été au sommet » de son niveau ici, garde un souvenir précieux : « c’était une fête avec beaucoup de gens italiens et aussi étrangers et c’était très drôle, mais aussi l’une des rares fois où cela ressemblait vraiment à une communauté ».
« Le sport nous apprend à nous dépasser, l’amitié nous apprend à nous retrouver. »
Il y a ces instants volés, ces gestes de fraternité qui dessinent les contours de notre tribu. Jean-Yves Garot, athlète de groupe d’âge, raconte sa fierté d’avoir été invité à la table des élites pour les cérémonies. L’accolade intense avec Arthur Serrières, le triple champion du monde, qui le reconnaît et prononce son prénom. Moi-même, en proposant de nager quelques mètres la veille avec lui : « quand une élite te propose ce genre de truc … oui ça m’a marqué. »
Il n’y a pas d’élite ni d’amateur quand la boue est la même pour tous. Il y a des hommes et des femmes qui partagent une passion.
L’Accomplissement
La ligne d’arrivée, ce n’est pas un point final, c’est un point de rencontre. L’aboutissement ne vaut que s’il est partagé.
Christophe se souviendra toujours du passage de la ligne « devant [ses] filles », avec la certitude de sa deuxième place. L’accomplissement est la récompense d’une famille qui soutient. Loïc va plus loin, prenant sa femme dans les bras juste avant de franchir l’arrivée. Le résultat, il le dit, « va aussi pour elle. C’est un résultat d’ensemble ».
« Le chemin est solitaire, mais la victoire est toujours collective. »
De même, Mila Lantelme, dans la catégorie Juniors, savoure son arrivée comme « un moment unique, une émotion très forte qui m’a rendue fière de tout ce que j’avais accompli ». La fierté n’est complète que lorsqu’elle peut être offerte aux siens.
Pour d’autres, le souvenir est un signe d’espoir, une promesse d’avenir. Tessa Lavendier garde en mémoire que Molveno fut son « premier championnat du monde », le début d’une belle carrière. Anna Zendhers, élite Suisse, quant à elle, retient l’amélioration de ses performances d’une année sur l’autre : une revanche personnelle, mais aussi un pas de plus dans son parcours.
Molveno s’en va. Il nous laisse le dénivelé, la boue, et le souvenir d’une aventure dantesque mais essentielle. Comme le dit Hannah Lee Young, Molveno est un « lieu de caractère », unique, impossible à comparer.
Mais nous, nous partons avec cette certitude : le XTERRA, ce n’est pas une course, c’est notre foyer.
